Interview avec Savin Yeatman-Eiffel, le créateur d'Oban !

Publié le 03 / 03 / 2017 à 20h30 dans Interview, Dernière Modification le 04 / 03 / 2017 à 17h23 Interview avec Savin Yeatman-Eiffel, le créateur d'Oban !
Le week-end dernier nous avons eu la chance de rencontrer un nom important du monde des coproductions animées franco-japonaises !

Le week-end dernier, nous avons eu la chance de rencontrer un nom important du monde des coproductions animées franco-japonaises ! Auteur et réalisateur de Oban Star-Racers, fondateur du -littéralement- studio de production Sav! The World Productions, c’est M. Savin Yeatman-Eiffel qui nous a accordé un peu de son temps pour revenir sur les dix ans d’Oban, mais aussi pour nous parler de tous les projets qu’il a en tête !


Tu as récupéré les droits vidéo de Oban, une sortie Blu-Ray ferait une bonne entrée d'argent pour de prochains projets.

Savin : Si on arrive à en vendre et qu'on ne se retrouve pas avec trois-mille Blu-Ray sur les bras, oui. [rires]

Ça va forcément marcher !

Savin : Si on en fait déjà un et qu'on en vend aussi sur le marché anglo-saxon, on va réussir à en vendre quelques-uns parce qu'il y a quand même du monde qui a vu la série. On est en train de remasteriser la série pour la diffuser, parce qu'on est obligés de les diffuser maintenant en 16:9, et plus en 4:3. On a envie de faire un Blu-Ray qui soit un 16:9 ou un 4:3 un peu collector en fonction des conditions dans lesquelles on le sort.

Vous n'allez pas couper l'image sur le Blu-Ray, si ?

Savin : Ça dépend, si on trouve un partenaire qui a envie de le diffuser plus largement et qu'il nous réclame absolument un 16:9, on verra. Dans tous les cas, si on fait un Blu-Ray, on fera un Blu-Ray 4:3 même si c'est une édition plus réduite. C'est pas encore fait mais on est en train de réfléchir à tout ça. On réfléchit à des petites choses autour d'Oban vu que c'était les 10 ans, c'était l'occasion avec Thomas Romain de reparler d'Oban, de se revoir un peu autour de tout ça... Et il y a une envie commune de faire des choses, donc on discute de certaines possibilités. Je peux pas encore trop en parler mais on a quelques petites idées sur lesquelles on travaille en ce moment.

Tu avais annoncé que tu dévoilerais quelque chose dimanche, en effet.

Savin : Je ferais peut-être une toute petite annonce. C'est encore très tôt parce qu'après il faut encore trouver les financements et tout. Mais on a déjà lancé le travail artistiquement pour s'amuser autour d'Oban. (NDR : Le lendemain il a annoncé réfléchir sérieusement à un spin-off ou une saison 2 de la série, un concept art a déjà été dévoilé).

Est-ce que tu peux nous parler de Saya no Uta ?

Savin : Saya no Uta, c'est un projet qui est en route depuis quelques temps. J'ai flashé sur le jeu quand j'y ai joué, j'ai un côté assez pervers et sombre que les fans d'Oban ne connaissent pas forcément. J'ai senti qu'il y avait quelque chose à faire autour. J'ai envie de l'amener plus vers l'épouvante que vers le gore, et vers le sensuel plutôt que le pornographique, comme il est dans le jeu. Par contre, je veux vraiment garder l'état d'esprit. J'ai énormément été marqué par ce rapport entre ce mec, complètement enfermé dans son monde, qui tombe amoureux pour la première fois de cette fille, puis qu'il finit par comprendre qu'elle n'est pas ce qu'il croit mais qu'il préfère ça plutôt que la réalité, qu'il rejette son humanité pour elle... Je trouve que c'est quelque chose d'assez fort sur l'amour, sur ce qui fait qu'on est humains. Je m'éloigne un peu de l'écriture du jeu en lui-même, parce que je me suis rendu compte pour l'adapter que ce qui marchait bien à la lecture et dans le jeu ne marchait pas de la même manière en film, donc j'espère que ça ne fera pas hurler les gens de la communauté de fans. Mais je suis, je pense, très très fidèle à l'esprit et la psychologie des personnages que j'essaye de pousser peut-être même plus loin encore que dans le jeu, dans une direction un peu différente mais qui reste très fidèle.

On bosse dessus depuis quelques temps, moi j'écris le scénario, et l'idée c'est de faire  un film en images réelles en langue anglaise. J'ai un réalisateur que j'ai contacté qui a un peu d'intérêt pour le projet. Je vais essayer de packager le projet avec le scénario et un réalisateur pour ensuite chercher des partenaires financiers.

Qui est le réalisateur ?

Savin : Je ne peux pas le dire parce que c'est un contact qui est encore assez frais. Je n'en dirais pas plus. [rires]

Est-ce que tu peux nous parler un peu du film Les 2 Reines ?

Savin : Alors, sur Les 2 Reines, c'est un petit peu comme sur Oban, on avait avancé un petit peu le projet un moment, il n'y a pas vraiment eu de répondant sur le marché. On était pas encore prêts donc j'avais remis ça dans mes cartons pour pouvoir le ressortir un peu plus tard, retravailler dessus et repartir de plus belle. C'est un peu pareil pour Les 2 Reines : on a bien bossé, on a fait un pilote qui est quand même sympa. J'ai mis beaucoup de temps à contacter Toshiyuki Inoue, qui est sans doute le plus grand animateur japonais en activité, afin de l'intéresser au projet et créer des liens sur le long terme avec lui. Ça s'est très bien passé mais ça a pris du temps car il est extrêmement dur à contacter il n'a pas de téléphone portable et les studios qui bossent avec lui n'ont pas trop envie que d'autres personnes viennent marcher sur leurs plates-bandes. Les gens au Japon ont été très surpris de voir qu'on peut travailler avec lui alors qu'il est normalement demandé plusieurs années à l'avance. Il nous a donné deux mois de son temps, il a fait le pilote, c'était vraiment une super rencontre.

De nos jours, faire un film réaliste et historique, en animation, qui n'est pas destiné aux enfants, même s'il y a un côté épique, un peu film d'aventure, c'est dur à financer, particulièrement en France. Je m'en suis rendu compte. Donc j'ai remis un peu les choses dans mon sac pour l'instant, mais on compte repartir sur des recherches de financements anglo-saxons, qui sont peut-être plus ouverts. C'est pas un film de genre mais c'est pas non plus le film historique classique, on est quand même dans le souffle un peu épique et je pense que ce sera mieux compris à l'étranger. On travaille aussi sur une éventuelle version en série d'animation et je bosse avec Joël Jorion sur une adaptation en bande dessinée, on a un contact avec un éditeur et on est en train de faire les premières planches. Je peux pas encore dire que ça va se faire mais on travaille dessus et ça nous amuse bien. On continue de maturer le projet et de trouver de nouveaux moyens d'aller au bout. J'y crois à fond, je suis amoureux de cette histoire, tout comme j'étais amoureux de Molly à une époque, je suis vraiment amoureux de Brunehilde et Frédégonde. Toutes les deux, dans des genres très différentes, sont fascinantes. Dès que j'ai lu cette histoire, j'ai lu tous les livres sur la période. Dès qu'il y a un musée, je fais des photos, je suis devenu complètement accro au Moyen-Âge. Je pense que c'est intéressant d'en parler, c'est une période méconnue mais qui est vraiment fondatrice : elle est la transition entre l'Antiquité et le Moyen-Âge, entre la culture de Rome qui est encore un peu présente et  la féodalité de petits chefs qui se battent. Il y a encore une reine, Brunhild, qui essaye d'unifier tout ça et de rester dans une vision de l'avenir. Et puis, on est dans un univers qui essaye plutôt de penser à court terme, dans lequel c'est chacun pour soi, et de voir une gentille reine qui meurt, qui perd d'une certaine manière mais qui gagne d'un autre point de vue. C'est une histoire fascinante. J'ai écrit beaucoup de choses là-dessus depuis plusieurs années et je réécris encore, j'ai fait plein de versions différentes. On cherche la version ultime qui va convaincre tout le monde et qui va nous permettre de persuader les indécis.

Tu as découvert ça par le bouquin de Cavanna ?

Savin : Alors, pas du tout. Je sais que Cavanna a écrit un bouquin que j'ai feuilleté rapidement, mais je ne voulais pas trop m'inspirer de ce qu'il avait fait. Ce qui m'a lancé là-dessus c'est le bouquin d'Augustin Thierry, un historien de la fin du XIXe, qui a écrit une vulgarisation du livre de Grégoire de Tours, L'Histoire des Francs, écrit au VIe siècle. Ce n'est pas une vulgarisation comme on en fait aujourd'hui, c'est quand même très proche du texte de Saint-Grégoire mais il a remis ça dans une prose un peu plus XIXe et c'était vachement intéressant. Après, j'ai lu le texte de Saint-Grégoire, qui en fait parle très peu des deux reines, mais on sent tout le potentiel de ce qu'il n'ose pas dire. Parce que ça passait mal à l'époque, deux femmes qui sont devenues chefs, qui ont damé le pion un peu à tout le monde, il n'avait pas trop envie de mettre ça en avant. On sent qu'il y a du non-dit et beaucoup de choses à imaginer en restant fidèle à l'histoire. J'ai voulu mettre des choses que je ne comprenais pas dans ces deux nanas. Il y a ce qu'on me disait, il y a les évènements, mais je ne comprenais pas la logique. Alors j'ai lu beaucoup de livres historiques, qu'ils soient récents ou plus anciens, ayant traité cette période et je pense qu'il n'y en a aucun qui m'a fait réellement comprendre ces deux femmes. Certains disent : "Oui mais ce n'est pas ce qui s'est passé. On pense que Brunehilde était gentille et Frédégonde méchante, mais c'est pas du tout vrai". Chacun part dans son petit délire, mais ils interprètent tous le même matériel de base qu'est le texte de Saint-Grégoire ; on peut lui faire dire ce qu'on veut à ce texte. Moi, ce qui m'intéresse, c'est comment deux petites nanas de rien du tout, dans un monde de guerriers, de rois violents, ont réussi à s'imposer comme reines et en plus à trouver le moyen, pour une fois qu'il y a une nana qui est reine, qu'il y en aît deux et qu'elles se foutent sur la gueule et se battent jusqu'à la fin de leur vie. C'est quand même fascinant et je voulais comprendre vraiment leurs motivations profondes. J'ai creusé et je creuse encore ces questions-là, pour donner vie à ces personnages, que ce soit crédible, dans cette folie d'ambition qui va les habiter.

Et pourquoi en long métrage ? Ce ne serait pas plus simple en série TV ?

Savin : J'ai commencé par une série parce qu'en effet l'histoire est très longue, il y a beaucoup beaucoup d'événements. Quand j'ai commencé à faire le pilote avec Inoue, je me suis rendu compte que ce serait compliqué. Ça appelait la gamme d'émotions qui demandait d'appeler de très bons animateurs, et que ça allait être très compliqué d'avoir de très bons animateurs sur une série. Donc je suis allé sur du long, le problème étant que c'est très compliqué de synthétiser une histoire aussi longue et aussi complexe en deux heures, donc c'est passé par beaucoup d'étapes de décantation pour aller vers l'extrême. Mais je joue toujours avec l'idée parallèle d'une série en animation, ou pas. Maintenant, la BD aussi reprend les éléments de réflexion qu'il y a eu sur la série. Je développe de manière un peu schizophrène les projets sur différents formats et dans différentes formes. En bossant sur l'un, ça me donne des idées pour l'autre, et au fur et à mesure, je vais arriver à la version ultime qui marchera.

Puis la BD pourrait lancer un intérêt pour le film ou la série, non ?

Savin : La BD, c'est pas encore fait, on a préparé quelques planches pour aller voir les éditeurs avec Joël, mais on a eu quelques petites touches. J'espère que ça va avancer. Mais oui, l'idée c'est que si la grande porte ne s'ouvre pas, qu'on essaye de passer par la petite porte, en créant un peu d'intérêt et de notoriété autour du projet pour que ça nous aide à avancer sur la version filmée.

Donc tu ne veux pas forcément tout sortir en même temps ?

Savin : Idéalement, ouais, s'il y a un gars qui arrive et qui me dit "Tiens, voilà, 40 millions d'euros on fait le film, la série et la BD" je dis banco on y va. Mais comme à chaque fois sur chaque support j'ai un traitement un peu différent, j'essaye de raconter plus ou moins de choses. Comme ça, si on a ensuite l'occasion de faire le film ou la série, que ce soit complémentaire sur la même histoire, mais vue d'un angle un peu différent : certains éléments qui ne sont pas dits dans l'un mais qui sont dits dans l'autre, pour que les fans d'un élément aient envie de voir ce qui se passe dans les autres versions.

Le médiéval, ce n'est pas un peu le point faible des animateurs japonais ? Ça rend pas le projet un peu compliqué ?

Savin : Le médiéval, quand tu regardes, bon certes c'est un peu plus stylisé, quand tu vois Escaflowne.

Je dois t'avouer que je ne peux pas m'empêcher de penser à Arion quand je pense à Les 2 Reines.

Savin : Oui, aussi. Il y a des noms de série qui m'échappent, mais il y a beaucoup de séries qui se situent dans un Moyen-Âge japonais. Mais faire un médiéval crédible, souvent mélangé avec du fantastique, donc on ne fait pas forcément le lien avec Les 2 Reines. Mais si tu prends un film comme Hashire Melos, c'est un vieux film mais la génération qui a fait Hashire Melos, la même que Inoue, est encore active. Il faut profiter de ces générations d'incroyables animateurs japonais qui ont moins l'occasion de faire du réalisme comme ils savaient très bien le faire. C'est l'idée de récupérer ce savoir-faire, Inoue étant vachement passionné par ce projet, je pense que beaucoup de ses amis pourraient être tentés de participer. Il faut juste un peu de financement, c'est un peu long à trouver mais j'ai déjà mis en place une équipe qui peut être extraordinaire.

Tu peux nous raconter ta rencontre avec Inoue ?

Savin : C'était très très long puisque, sans entrer dans les détails, j'ai commencé à bosser avec un studio parce que je pensais que ce studio m'amènerait Inoue puisqu'ils le connaissaient bien. Ca avançait très lentement, on est partis au Japon pour commencer la prod du pilote. Là, ils m'ont dit qu'Inoue, ce ne serait pas possible, mais qu'en plus ils ne savaient pas qui serait le Chief Animator alors qu'on devait commencer deux semaines plus tard.

C'était quel studio ?

Savin : Non je ne dirais pas [rires] (NDR : nous supposons qu'il s'agisse de P.A. Works) C'est un studio respectable par ailleurs, mais finalement j'ai dit que ce n'était pas possible. On y est allés un petit peu au clash, et j'ai décidé de prendre la porte de sortie qu'ils m'ont un petit peu entrouverte à un moment. Je suis revenu en France et on a relancé la recherche d'Inoue, donc c'était un peu du temps et de l'argent perdu. C'était terrible, surtout pour moi qui n'ait pas des fonds monstrueux pour du développement. Finalement, on a relancé nos contacts avec Inoue et j'ai réussi par finir à le choper. Alors, comment j'ai fait ça ? Ah oui, avant de repartir en France j'ai réussi à avoir l'adresse d'Inoue parce qu'il n'a pas de téléphone. Je lui ai envoyé une longue lettre, en japonais, écrite par mon épouse. J'ai expliqué que j'adorais son travail, j'expliquais pourquoi, comment, et ce que j'essayais de faire sur Les 2 Reines. Le lendemain, il m'a rappelé. Comme quoi, le courrier, ça marche encore ! Donc on l'a vu mais il était complètement indisponible, il était en train de travailler, si je me souviens bien, sur l'Ile de Giovanni, mais il m'a dit "Peut-être que j'ai un trou." Ou alors il bossait peut-être sur Evangelion ? Peut-être qu'il était sur Evangelion, plutôt. Mais il avait un trou entre les deux Evangelion donc il m'a dit peut-être. Il m'a aussi dit que si l'un des autres grands réalisateurs avec qui il travaille régulièrement lui demandait de venir, même s'il aimait mon projet, il irait. Je lui ai dit ok, je prends le risque et j'attends. J'avais plus trop de nouvelles, il fallait aussi qu'on ait un Character Designer qui marche pour lui. On avait beaucoup de mal à trouver des Character Designer japonais arrivant à travailler dans le style qu'on voulait. En plus, quand j'avais le malheur de leur dire "C'est cool, on a déjà Inoue qui travaille sur le projet !", c'était en fait une erreur totale parce qu'ils flippaient à mort et disaient "Merde j'ai fait un truc, et si Inoue n'aime pas...", donc tout le monde fermait la porte. C'était assez terrible. Le temps passait, on n'avait personne, Inoue ne répondait pas. Je me disais que c'était mort et que ça n'allait pas se faire. Tout à coup, il me rappelle en octobre, il me dit que c'est bon, que finalement il a un trou de deux mois et demi en novembre et qu'il peut bosser. C'était quatre semaines plus tard, et putain j'avais toujours pas de Character Designer sous la main. Je contacte BahiJD en catastrophe, qui est l'un des animateurs que j'avais rencontré au Japon dont j'avais bien aimé le style. Je lui ai dit "Écoute, t'es un petit jeune qui en veut" étant donné qu'à l'époque, il était encore nouveau mais il a beaucoup augmenté depuis. Je lui ai dit que j'avais bien aimé ce qu'il avait fait.

C'était avant ou après Dandy ?

Savin : C'était bien avant, c'était au tout début ! Donc je lui ai dit que j'avais bien aimé les quelques trucs que j'avais vu de lui,  qu'il était dans un style un peu entre-deux, entre l'occidental et le japonais, que ce serait vraiment bien de faire un truc ensemble. Je lui ai payé son billet d'avion depuis l'Autriche, il a dormi à la maison pendant une semaine dans la chambre d'amis et tous les jours je le faisais bosser, on est restés quinze jours. Tous les jours, j'étais derrière son dos à le faire chier : "Plus à gauche ! Plus à droite !" parce que le Character Design c'est pas non plus son truc principal, il a son propre style. Ça a été un peu dur pour lui mais on avait peu de temps, il fallait terminer non seulement les deux personnages principaux, mais aussi faire les Model Packs et tout. Donc on a bossé, bossé, bossé. Joel est aussi revenu faire quelques dessins, parce que lui c'est un dessinateur mais pas un animateur, donc c'était un peu dur pour lui de faire des Turn Around, de garder exactement le même style. Bahi avait quand même plus cette facilité là. On a fait un Model Pack en catastrophe mais qui était beau, qui était sérieux. Je suis reparti au Japon avec ça et on a commencé le travail dans un petit studio qui s'occupait plus du compositing, un peu du suivi mais c'est moi qui avait mis l'équipe en place avec Inoue. Et Inoue, en deux mois, et pour un tarif préférentiel, nous a fait un petit pilote qui n'est pas parfait mais qui montre bien ce qu'on peut faire sur le long. Il est tellement bon qu'il fait un plan par jour.

Il a tout fait tout seul ?

Savin : Alors ouais, il y avait quand même M. Honda, animateur très très connu qui bosse sur Evangelion qui est venu en aide et qui a fait un plan et demi. Donc on avait quand même du beau monde. Thomas Romain a fait les décors donc c'était quand même une bonne expérience de travail.
Donc on a ce petit film, j'ai cherché le financement avec ça mais en Europe je n'ai pas eu le répondant que j'espérais. Le problème c'est que je ne suis pas un nom, je ne suis pas dans Télérama, ni un grand auteur de BD, donc malheureusement dans le système français c'est un gros gros blocage si on propose quelque chose d'un peu différent de ce qui se fait habituellement. C'est autorisé pour certains grands noms, et même si c'est raté ce n'est pas grave parce qu'on a travaillé avec un grand nom, mais avec moi ça n'a pas été possible. Mais je continue à penser au succès du projet, j'ai rangé un peu le projet pour pas trop le griller, pas non plus trop l'exposer après des réponses que j'ai trouvé un peu moyennes. Mais on bosse à nouveau et on va relancer ça.

C'était peut-être pas le bon timing aussi ?

Savin : Comme pour Oban, c'est une configuration d'éléments. Il faut des partenaires qui soient ouverts, qu'il y ai besoin de ce genre de projets à ce moment-là. Il faut que tout le monde ait poussé notre développement à un niveau qui atteigne l'excellence qu'il n'avait peut-être pas encore entièrement la fois d'avant, et qu on ait l'élément pour convaincre dans un pitch simple que c'est un bon projet et qu'il a du potentiel. Il faut arriver à ce résultat-là, ça peut prendre du temps malheureusement. Il faut tenir, il faut avancer et il faut faire d'autres choses à côté pour pas mettre tous ses œufs dans le même panier, parce que sinon on se jette d'un pont. Mais avec les autres projets qui avancent aussi parallèlement, je pense qu'on y arrivera un jour ou l'autre.

Et si tu pouvais le monter en live, ça te déplairait ?

Savin : Je serais très heureux de le monter en live, là je confierais ça à un réalisateur pour le porter. Le problème, c'est que si le projet est cher à monter en animation, il est cher à monter en live. Il est un petit peu cher en anim pour une production française, mais comparé à une production française de Titeuf par exemple, on est moins chers. On a les meilleurs animateurs mondiaux à la production. Mais voilà, c'est le système de production japonais, en connaissant le système de l'intérieur, qui permet de travailler avec des tarifs japonais qui sont en fin de compte assez faibles pour la qualité qu'on peut avoir. Mais il faut quand même cet argent malgré tout, et je ne peux pas le sortir comme ça de ma poche.
Alors en live pourquoi pas, l'écriture est très proche du live, très réaliste, mais ça ferait un film qui de suite passerait de quelques millions d'euros à quelques dizaines de millions d'euros, donc ça, c'est encore un nouveau challenge. Il n'y a pas beaucoup de sociétés en France qui pourraient se permettre de lancer un projet comme ça. Après, aux Etats-Unis, oui, mais arriver à convaincre des partenaires américains, c'est encore une autre galère.

Mais si Netflix veut un Game of Thrones ?

Savin : Oui, mais à nouveau, le problème, c'est que je n'ai pas une société ou une stature qui me permet d'approcher ces gens dans les bonnes conditions. Ça peut se faire si on se croise et qu'on peut en discuter entre quatre yeux, mais pour des procédures comme ça, il faut déjà avoir un bagage. Sur Oban, on était l'exemple du contraire, on avait jamais rien produit avant, on avait fait des petits films et des petits courts et on aurait pu complètement rater et ne pas être à la hauteur artistiquement. Mais il se trouve qu'on était tous des bosseurs, on avait chacun un background de notre côté, ce qui fait que ça avait marché sur la prod. Par contre, c'est très difficile de convaincre des grosses boîtes d'investir comme on l'a fait, d'avoir des boîtes comme Disney et Bandai qui investissent sur une petite boîte de rien du tout, même si le projet est super sexy, les gens ont peur. Mais c'est ça la solution d'une certaine manière, c'est d'avoir un projet qui devient tellement excitant, tellement beau, tellement bien fait, qu'une grosse boîte est prête à prendre le risque de suivre.

Et quels sont les autres projets que tu as en parallèle ?

Savin : Alors déjà, il y a Les 2 Reines, Saya no Uta, des choses autour d’Oban, ça fait déjà un certain nombre de petites choses. J’ai aussi acheté les droits d’une pièce de théâtre argentine écrite par Claudio Tolcachir, un nouveau grand auteur argentin. Il a gagné avec cette pièce le prix de la meilleure pièce argentine, le prix de la meilleure mise en scène en 2005. C’est une pièce qui a quelques années maintenant mais qui s’est rejouée et que j’ai vu au festival d’Avignon il y a deux ans. J’ai vraiment adoré la pièce et je voudrais en faire un film en images réelles, plutôt à petit budget cette fois étant donné que j’ai tendance à faire des projets un peu trop ambitieux et compliqués à monter. Je me suis dit qu'on allait faire quelque chose d’un peu plus "arts et essais". En France, tu fais une grosse comédie un peu lourde, t’as des débouchés.Tu fais un petit film d’art et d'essai, t’as des débouchés. Mais des films de genre ou les films que j’aime habituellement, c’est quand même plus dur à monter. Donc faire un film d’art et d’essai mais qui garde quand même ma veine, ma patte. Le texte de Claudio est complètement fou, on a des personnages déjantés qui sont une famille recomposée qui part en vrille et s’auto-détruit. Il y a vraiment un truc sympa à faire avec ça, donc je bosse sur le scénario de ce projet aussi. Ce sera un film live à petit budget, tourné avec assez peu de décors, une petite équipe de jeunes acteurs, ce serait un truc très sympa à faire.

Comment s’appelle la pièce ?

Savin : Ça s’appelle Le Cas de la famille Coleman. La Omisión de la Familia Coleman !

Tu parles la langue ?

Savin : Non non, je connais juste le titre en espagnol. [rires] Et là encore avec ce projet, tout comme avec les japonais, j’ai rencontré Claudio qui est un artiste indépendant, qui est assez demandé. Mais il a fait sa pièce tout seul dans sa maison, qui est devenu le théâtre, c’était joué dans le salon dans lequel les gens venaient s’installer. C’est des gens qui sont des artistes très personnels, alors arriver à convaincre Nitroplus, Gen Urobuchi, une petite boite comme moi, qui suis créateur aussi... On est arrivés à se trouver des points communs, à s’entendre et tenter des trucs ensembles assez risqués, mais qui peuvent être vraiment sympas si ça marche bien. Je vais sur des créneaux qui ne sont pas les créneaux de grosses structures qui vont acheter le best-seller puis le lancer. Donc en même temps ça ne m’apporte pas l’assurance au niveau du financement de tout de suite trouver des millions. Saya no Uta, il y a vraiment des fans très forts, il y a une base, mais ce n’est pas non plus la base grand public que Gaumont ou UGC va vouloir. Mais il y a quelque chose de fort dans l’histoire qui m’intéresse surtout : moins l’achat d’une licence qui garantit un financement facile, mais plutôt une super histoire qui a un vrai potentiel en cinéma et de jouer avec ça.

Tu veux produire ça en France ?

Savin : Alors oui, La famille Coleman, l’idée c’est vraiment de l’adapter pour la France, transformer les personnages argentins en personnages très français. Par contre, Saya no Uta, l’idée c’est de faire un film en anglais pour un marché international et tourné dans un pays anglo-saxon. Ça peut être le Canada, les Etats-unis... Ça dépendra de qui financera. Si on regarde bien, Saya no Uta, ça peut même se passer n’importe où, il n’y a pas d’éléments typiquement japonais. Donc l’idée, c’est vraiment de l’adapter pour un marché international plutôt que de rester sur un créneau japonais.

Les droits de Saya no Uta, tu les as obtenus avant ou après le succès de Puella Magi Madoka Magica ?

Savin : Alors, c’était avant, mais Gen Urobuchi commençait déjà à être bien connu quand je les ai eu, c’était au moment de Psycho-Pass. C’est un jeu qui n’est pas aussi grand public que ce qu’il a pu faire par la suite. J’ai quand même dû bien négocier, sachant que négocier avec les japonais, c’est quand même très compliqué parce qu’ils sont très attachés à leur licences, ils ne les lâchent pas facilement. Puis quand on voit qu’ils les ont parfois lâchées à des personnes qui les ont tant dénaturées, on peut comprendre qu’ils soient un peu inquiets. C’est très important pour eux, l’image du studio. Gen Urobuchi et Nitroplus sont vraiment indissociables, il est salarié de la boîte, alors ils préfèrent ne rien faire plutôt que de faire quelque chose qui risque d’être raté. C’est des questions de confiance, de rapports, de se rencontrer, de se parler. Puis il y a ce que j’ai fait avant qui montre que je suis prêt à travailler sur le long terme et préférer ne rien faire plutôt que de faire quelque chose qui ne serait pas à la hauteur.

Tu aimes beaucoup la culture médiévale et française ?

Savin : En fait, je me passionne aux choses par rapport à des projets. J’ai toujours aimé le Moyen-Âge, j’ai toujours aimé la littérature chevaleresque de cette époque.

Comme Rabelais ?

Savin : Il y a Rabelais mais je suis plus dans d’autres choses, des choses épiques. On oublie qu’il y a toute une littérature de chevalerie au XIIIe, XIVe, XVe et XVIe. En dehors des Chevaliers de la Table Ronde, il y a beaucoup de choses qui se sont faites aussi dans d’autres pays européens et j’adore ça. Après, le Moyen-Âge, ce n’était pas quelque chose que je connaissais particulièrement, c’est quand je me suis passionné pour Les 2 Reines que j’ai commencé à apprendre. Quand tu veux créer un projet comme ça tu te dis : « Ok, il allume une torche. Ah ouais mais il a une torche, comment est-ce que tu allumes une torche au VIe siècle ? ». Donc tu vois, il faut un silex mais ça prend du temps, la galère d’allumer une torche... Puis faut qu’il ait un petit peu de sable dans sa poche, il ne peut pas le faire à tel ou tel moment. Ou alors il monte à cheval, d’accord, mais est-ce qu’il a une selle ? Elle est comment ? Y a des étriers ? Le mors, il est comment ? Le cheval, c’est un grand cheval ? Un petit cheval ? Quelle race ? C’est vraiment tout creuser ! S’il mélange, qu’est-ce qu’il mélange, s’il boit, qu’est-ce qu’il boit ? Dans un verre en quel matériau ? C’est un verre en verre ? En corne ? En terre cuite ? Et donc tu creuses, tu creuses, tu creuses, et ça devient un puits sans fin assez dangereux  quand comme moi tu es producteur-auteur et que tu peux laisser passer le temps un peu trop facilement. Il faut bien gagner de l’argent un jour, quoi ! [rires] Donc parfois, je me perds un peu, et je passe trois semaines dans des délires de recherches pour un truc à la con... Mais ça nourrit le projet, et ça me passionne de plus en plus ! Maintenant, je commence à avoir une connaissance relativement bonne de la période, bien que je découvre encore edes choses et que je suis comme un fou dès qu’il y a un musée avec trois fibules dans des petites villes.

Tu as pris des cours ? Tu as rencontré des historiens ?

Savin : Non, j’aurais sans doute dû le faire. Je devrais le faire. J’ai lu beaucoup de livres d’historiens et j’étais assez souvent énervé de certaines analyses d’historiens sur les deux reines que je ne trouve pas crédibles psychologiquement parlant. J’ai un peu un problème avec les historiens et la matière "histoire" telle qu’elle est étudiée. J’ai des amis qui ont fait des facs d’histoire, et là-bas ce qu’on te raconte,  c’est que : "si vous pensez qu’on va parler des grands Hommes, oubliez : on est là pour parler des choses quotidiennes". C’est peut-être important, mais moi je suis fasciné par les grandes figures de l’Histoire. Je pense que ce sont des figures fortes. Tu vois Dumas, je n’ai pas honte d'aimer Dumas. Au Japon, ils font tout le temps des séries sur leur histoire, l’époque des samouraïs, etc. La NHK fait chaque année des séries de plus de 90 épisodes ! En Corée, il y a des succès énormes avec des séries de plus de 50% de la part du marché sur des séries de plus de 80 épisodes ! C’est incroyable qu’en France, on ne se tourne pas vers notre histoire, alors qu’il y a pleins d’histoires qu’on peut traiter, il y a les mousquetaires, il y a Napoléon... Mais particulièrement, le Moyen-Âge, qui est une période hautement intéressante avec des personnages hors normes et plus grands que nature, il faut faire quelque chose avec ça. Merde, quoi !

Tu ne penses pas qu’il faudrait faire Pantagruel et Gargantua en anime ?

Savin : Ça serait sympa, j’aime bien le texte. C’est truculent, c’est drôle. Déjà, je galère avec les projets que j’ai maintenant, mais j'y verrai dans un autre temps. Un autre projet dont je ne parle pas parce que celui-ci il est top secret et j’ai passé beaucoup de ces dernières années dessus. Je l’ai montré à très peu de gens, mais avec de très bons retours à chaque fois que je le montre. C'est un projet qui est un peu cher et j’ai compris que je ne pourrais pas le monter pour l’instant. Je veux le réaliser moi, c’est le projet de ma vie, l’ambition de ma vie, encore plus que Les 2 Reines. J’essaye de monter des projets, augmenter un peu ma stature et mon positionnement pour pouvoir proposer ce projet et pouvoir le réaliser avant de mourir. C’est adapté d’un ouvrage, qui n’est pas de Rabelais, mais c'est un grand classique un peu oublié, ce sera très compliqué à monter. J’ai déjà mon sac de projets compliqués à monter mais ça serait une bonne idée. On pourrait imaginer ce que ferait Terry Gilliam, le Terry Gilliam de la bonne époque sur un Rabelais.

Tu connais l’original du Baron de Münchhausen, le film allemand ?

Savin : Oui, évidemment. Mais quand on me parle de Münchhausen, je pense surtout au film de Karel Zeman qui est vraiment génial. Le film allemand est bien, mais je préfère Terry Gilliam. Je suis un fan inconditionnel du Voleur de Baghdad, la version de 1924 de Fairbanks, c’est un des plus grands films qui a jamais été fait au niveau de la force visuelle. Quand on voit les Gilliam, on voit beaucoup d’influences de beaucoup de films, il y a des influences croisées mais ça n’enlève rien à sa personnalité. C’est marrant quand tu aimes beaucoup certains films qui semblent être d’une pure originalité mais qu'on se rend compte, quand on pousse plus loin sa connaissance du cinéma ou de la littérature, de voir d’où vient telle idée. C’est rare qu’une idée soit purement originale même si elle est retransformée par la suite, qu’on lui donne une nouvelle vie, une nouvelle forme. Tout a une origine, jusqu’à l’Antiquité.

C’est bien d’entendre un créateur dire ça et qui assume ses influences. Souvent, on rencontre des créateurs qui s’inspirent mais qui ne veulent surtout pas qu’on le dise. Comme M. Kawamori justement.

Savin : Ça dépend... Miyazaki, il a quand même distribué Le Roi et l’Oiseau donc je pense qu’il assume un tout petit peu. Il n’en parle pas si souvent que ça mais il y a une influence tellement claire.

Il ne parle pas de l’origine de Nausicäa par contre, avec la BD de Moebius, Ballade, dans laquelle on retrouve tout l’univers de Nausicaä.

Savin : J’irai regarder, je connais Moebius mais celui-là, je ne le connais pas.

Il est dans le recueil L’Homme est-il bon, il ne fait que neuf pages. C’est pour ça que Moebius aimait beaucoup Nausicaä, c’est parce que c’est son univers.

Savin : Après, il y a les influences et ce que fait l’auteur de ses influences. Quand tu lis la BD de Nausicaä, un des plus grands mangas si ce n’est le plus grand manga qui n’a jamais été fait, puis que tu regardes le film, qui est génial, j’adore le film !  Mais le manga... C’est comma Akira, j’adore le film, c’est un de mes films préférés, tout comme Nausicaä, mais les manga sont tellement plus riches et vont tellement plus loin que c’est génial.

Puisqu’on y est, tu as d’autres références en animation ?

Savin : Les choses que j’aime bien ? Je prêche toujours pour Hashire Melos pour que ce film soit reconnu et qu’on s’en rappelle. J’ai découvert ça avec un plaisir fou et c’est d’une beauté incomparable. Un film que j’ai découvert il n'y a pas si longtemps que ça, c’est Parasite Dolls, qui est assez violent mais dans un style réaliste. C’est vraiment le délire poussé au maximum des OVA des années 90. Il y avait de l’argent, il y avait surtout des animateurs vraiment prêts à monter la barre en animation réaliste. Puis la 3D est arrivée, les cellos ont disparus et on a perdu un peu cet esprit là, mais ils étaient arrivés à un niveau... C’est juste pas possible. Ça a un tout petit peu vieilli parce que maintenant, on est habitués au rendu numérique du compositing. Mais ce qu’ils arrivaient à faire au niveau des mouvements, des costumes, des personnages, des impacts de balles, des effets FX... C’est incroyable, quoi. En dehors de l’histoire qui est sympa, c’est un impact visuel. Les histoires, c’est important, moi-même je suis scénariste, mais pour certains cas de figure, comme Akira, malgré l’histoire géniale, le niveau visuel est tellement fort que ça me transporte. Akira, j’ai pleuré pendant trente minutes après le film, j’étais vraiment en spasme, j’arrivais pas à me contrôler, j’avais jamais vu un truc aussi beau, aussi fou. Tout, la musique, l’image... À la fin, il meurt, mais sans mourir. Je l’ai vu en 1991 dans une petite salle près de Hyde Park en Angleterre. Je pense c’est l'une des premières salles qui le diffusait en occident, c’était une tuerie.
Une série qui reste super forte pour moi sinon, c’est Mirai Shonen Conan, que je trouve être une grande série. Tout Miyazaki est déjà là. Je pense qu’on a rarement mieux fait dans une série grand public pour enfants. C’est touchant, c’est drôle, et il y a des moments forts.

Tu les as vu en haute définition ?

Savin : Pas encore. J’ai commencé à les regarder avec mon fils, faut que je continue.

En 1080p, ils sont vraiment magnifiques.

Savin : Oui. Ça, j’ai eu l’occasion d’en parler avec Miyazaki, parce que j’ai rencontré Miyazaki. On visitait le studio Ghibli avec Stan et Thomas, on connaissait des gens qui faisaient du compositing pour nous qui bossaient aussi là-bas. On arrive tard le soir, à la fermeture du studio, parce que c’est l'un des rares studios à avoir des horaires très classiques, des horaires normaux. Donc à 19h, il n’y a plus personne. On se balade dans les locaux, on arrive dans une grande salle et là, je vois un petit bonhomme assis, de dos, avec les cheveux gris en train de gribouiller. Et je me dis, cette tignasse de cheveux, elle me dit quelque chose. Et là, il se retourne, il vient vers nous et il nous dit « Qui est là dans le studio ? Dans mon studio ? A cette heure-là ? Qui vous êtes ? Des étrangers ? » On se dit oulah ! C’est mal parti. On lui explique gentiment qu’on est des français venus produire une série en coproduction avec les japonais, donc ça commence à l’attirer, et finalement il a été vachement cool. Je sais qu’il peut être très dur avec ses collaborateurs, mais avec nous il a vraiment joué le rôle de vieux sage. On a parlé pendant une demi-heure, voire une heure tout au plus, et il m’a raconté pleins de trucs sur Mirai Shonen Conan vu que je lui ai dit que c’était une de mes références au studio japonais avec qui on bossait. Et il m'a raconté la galère, les épisodes qui se terminaient quelques heures avant la diffusion, des épisodes où il fallait tout faire en une semaine, les trucs vraiment incroyables qu’il faisait. Il m’a dit quelque chose de très fort aussi, que je n’ai jamais oublié, il m’a dit : «  La créativité, c’est comme une serpillère. C’est rempli d’eau, ensuite il faut essorer jusqu’à la dernière goute, et après, on laisse à nouveau la serpillère se remplir, mais il ne faut pas avoir peur de vider toutes ses idées sur un projet. Il faut tout mettre et ensuite repartir sur un autre projet. » Donc, un grand monsieur de l’animation et du cinéma en général.


Nous tenons encore une fois à remercier M. Savin Yeatman-Eiffel pour ce moment qu’il nous a accordé, nous avons hâte de voir ses projets prendre forme !


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Informations sur l'auteur :

ElduRSverO

ElduRSverO

Anime Otaku, j'ai consacré beaucoup de mon temps afin de me spécialiser dans l'animation japonaise de 1917 à nos jours. Mes séries préférées sont Neon Genesis Evangelion, Giant Robo the Animation: Chikyuu ga Seishi Suru Hi et Concrete Revolutio.



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Jalil

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J'ai lu Toshiyuki Inoue et Takeshi Honda, je signe D I R E C T